C’est l’histoire d’un homme et d’une femme. Aurore qui, avant d’atterrir loin du monde, dans la maison héritée de son père, dans les Causses, « a travaillé plus pour gagner la même chose, puis travaillé moins pour aucune différence, (elle) a été normale et cynique, libérale et ratissée, amoureuse, patiente, infidèle, sadique et à nouveau calme, a fait des injections sous la peau, écoute encore Noir Désir sans faire exprès quand ça passe, lit la presse quand ça sonne ». Maria Pourchet a l’écriture scintillante et foudroyante dans son western, « un endroit de l’existence où l’on va jouer sa vie sur une décision, avec ou sans désinvolture, parce qu’il n’y a plus d’autre sens à l’existence que l’arbitraire ». Face à Aurore, un comédien célèbre, Alexis, « habité de ce génie sans traces qu’est la névrose ». Histoire de donner dans le triangle amoureux, une jeune actrice, Chloé, subjuguée par Alexis à l’issue d’une audition, l’aborde à la fin d’un dîner de la troupe, lorsque « l’assemblée rayonnante devient bruyante » et « quand le passage des graisse cuites et des alcools dans le sang épaissit les haleines et les idées ». Les phrases écrites au couteau s’enchainent et claquent, longues ou courtes. A la faveur d’un viager, Alexis débarque donc dans le refuge d’Aurore; débute alors ce western où « les hommes arrivent chez les femmes comme chez la mort. Toujours trop vite, en avance. » C’est aussi vite que le roman attrape son lecteur dans ce récit que certains à la vue courte pourraient qualifier de féministe, « un homme n’est occupé que de sa propre croissance ». Mais, Maria Pourchet est bien trop maligne pour cela, ne laissant place qu’à la force de son récit en route, se payant au passage le monde du théâtre entre « folles de Pasolini, toujours à moitié à poil sur le plateau » et « exaltées biberonnées à Claudel, jouant pieds nus ». Et de rajouter: « les plus intéressantes restant les asociales qui, d’aucune fête et impuissantes à flirter dans les amphithéâtres, espèrent au gré d’une scène entre Camille et Perdican, la rencontre du trimestre. » Afin de ne pas devoir payer des droits d’auteur à Stock à force de citations, on vous laisse découvrir ce roman écrit au couteau, aux personnages à l’opposé du style flamboyant. Voilà qui méritait bien un prix, celui du Café de Flore où vous pourrez peut-être croiser Maria Pourchet, invitée à l’année dans ce lieu où, parait-il, le premier étage serait propice à l’inspiration. A voir…
AW
Western de Maria Pourchet chez Stock, 20 euros