Chaque semaine, Doc.On.Web propose un documentaire diffusé sur la toile. Une sélection non exhaustive, totalement subjective, pour voir, entendre et penser. Cette semaine, Il corpo delle donne / Le corps des femmes. Assumons. Je l’aime.Une poitrine généreuse. Des lèvres charnues. Une épaule dénudée. Je n’y suis pas insensible. Au contraire, j’aime les corps des femmes. Mais pas celui dont il est question ici. Il corpo delle donne est une démonstration froide, systématique et sans complaisance de l’usage du corps féminin à la télévision italienne. Autant le dire, ça fout les jetons.
Un corps comme un bout de viande
Pendant 25 minutes, la chair est exposée comme l’est la viande à Rungis. La femme perd peu à peu ses charmes habituels. Ne subsistent que des attributs physiques maquillés, gonflés, opérés, déformés. Seins, lèvres, fesses, yeux, cuisses sont des victimes consentantes de mutilations. Le corps objet. D’amusement, de moquerie, d’humiliation. Grotesque, sordide. Ce Freaks moderne, nous est conté par Lorella Zanardo. Enseignante italienne mais aussi entrepreneur et consultante, elle a compilé des extraits sélectionnés parmi 400 heures de shows de la télé italienne publique et privée. Ce montage déconstruit le fux d’images pour interroger les conséquences sociales de l’élimination progressive du corps de la femme sur les écrans. Lorella Zanardo parle d’un « état d’urgence ». Elle lance un appel aux femmes. Pourquoi ne descendent-elles pas dans les rues afin de protester contre ces représentations ? Pourquoi la population est-elle captive du pouvoir de la télévision ?
Télévision obscène
La télévision est-elle le miroir de notre société ? Si oui, cette dernière est mal en point. Le chercheur, activiste et auteur américain, Duane Elgin évoque les changements profonds provoqués par « l’océan électronique ». A trop nager dans certaines eaux numériques, nos valeurs et nos modes d’être sont modifiés. La télévision peut être ce bain, refet réducteur et distordant du réel. Il ne faudrait pas croire que notre paysage audiovisuel est épargné de ces images. Comme le nuage de Tchernobyl, ces représentations du féminin ne se sont pas arrêtées à la frontière alpine. Les jeux télés (Le Juste Prix ou La Roue de la fortune en tête) mais aussi la météo révèlent des femmes humiliées, souvent avec leur consentement. Contre cet état de fait, Lorella Zanardo appelle à réagir. À agir. Pour éviter la répétition de ces erreurs et se montrer tel que nous sommes, hommes et femmes sans artifice. À moins que nous n’ayons peur de le faire. Mais de quoi ?
Par Olivier LAMBERT
Il Corpo delle donne De Lorella Zanardo, Cesare Cantù et Marco Malf Chindemi Italie. 2009. 25 minutes.
(traduction française)