10 janvier 2012
Looking for Sarkozy

 

Diffusé par Arte qui a obtenu ce soir-là sa meilleur audience de l’année, voilà un  documentaire à ne pas rater en cette campagne de réélection. Réalisé par William Karel à qui l’on doit un génial « Le monde selon Bush », il est le résultat de sept mois de travail pour savoir comment la presse étrangère voit notre cher président…Au total, 18 correspondants qui racontent à l’aide d’un montage virtuose, sans commentaires et d’images d’archives, comment Nicolas Sarkozy a été élu sur des promesses, promettant l’action au sortir d’années dignes de Brejnev comme le souligne Steven Erlanger, du New York Times. Un homme moderne, qui a pris  le pouvoir avec « les dents » comme il l’a dit lui même, hyperactif au point que, pour le suivre, l’agence Reuters dû prendre deux personnes contre une seule auparavant…Se voulant « Président du Monde » et comme un enfant dans un magasin de jouets lors de ces premiers sommets internationaux. Et là, les journalistes interviewés sont tous d’accord pour dire que l’on voyait qu’il manquait de confiance et « n’avait pas de vision de la France ». Charles Bremmer du Times précise même« Pour lui, tout était slogan ». Avec cette idée qu’il avait trompé son monde, eux comme les français « en se révélant ne pas être l’homme qu’on croyait ». Acte I, Cécilia, « Desperate housewife », sans laquelle « il semblait perdu ». Ainsi le décrivent-il comme ostentatoire, impoli  lorsqu’il arrive en retard au Vatican, ne se maitrisant pas – « Casse toi pauv’ con », mari quitté en octobre, à nouveau en couple  en novembre, « le règne de l’information spectacle commence ». Comme avec cette scène incroyable où il arrive en pleine réunion de Carla avec le magazine »Femme actuelle », tout heureux de dire devant ces dames, qu’il vient de déjeuner avec le président de l’Irak. Ce à quoi répond Carla par « Génial » en lui caressant la main après un baiser sur la bouche-devant les caméras. Du soft après le voyage à Pétra où son beau fils juché sur ses épaules se cachait les yeux, mitraillé par les flashs des photographes…Ainsi, pendant des mois, le président se mettra t- il en scène, « un jour, une image », réagissant à tous les faits divers « même le teckel écrasé en province ».

Une Cour royale

Le positif? A l’international, assurément comme la Géorgie en 2008 et dans la foulée, sa présidence de l’Europe. Et bien sûr la Libye et sa réactivité face à la crise grecque, même si le couple Merkozy est loin de s’aimer. « Elle ne supporte pas qu’il la touche, même si elle le comprend bien  mieux depuis que son mari lui a offert une cassette de Louis de Funès! ». Quant à Obama, « il en est jaloux-Super Obama n’a-t’ il pas remplacé Super Sarkozy?- d’autant que contrairement à lui, celui-ci s’en fout d’être aimé ». Mais ce qui les frappe tous, c’est cette absence de contre pouvoirs, « qu’il n’y ait eu personne par exemple,  pour oser lui dire que son fils Jean, à la tête d’une énorme structure à l’âge où l’on est content d’être stagiaire, non, ça ne passerait pas. «  Autre image forte, le virage à droite et l’affaire des Roms, pur calcul politique qualifié de « dégueulasserie », « acte populiste » « ignoble »- tous sont d’accord. Et de commenter ensuite ses sorties présidentielles en France dans des villages « Potemkine », où les gens sont rigoureusement choisis, assurant la claque et l’empêchant de sentir le poul de la vraie France. Ou son ratage pour le Printemps arabe, le journaliste d’Al Jazeera soulignant comment « il n’a rien vu », tandis que Michelle Alliot- Marie proposait l’envoi de policiers français en Tunisie…

Machine de guerre

Oui,  mais voilà, Sarkozy va entrer à nouveau en campagne, désormais plus en retrait, relooké par Carla, « il a cessé de ressembler à un chauffeur de limousine », père de famille et au meilleur de lui même lorsqu’il doit conquérir le pouvoir. Un « bateleur » né, qui « s’il n’a rien bâti  » est persuadé » d’avoir fait un sans faute ». Alors , même s’il restera » le destructeur de la Vème République », en ayant totalement « décrédibilisé la parole politique » concluent  les correspondants étrangers,  Steven Erlanger est sûr d’une chose: rien de ce qui est dans ce documentaire ne lui fera perdre les élections!

 

Par Laetitia Monsacré avec Elvire Camus

 

Looking for Sarkozy, le DVD est disponible chez Arte Editions avec en bonus un entretien avec Christian Salmon, « Comment fabriquer un président  »


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