10 février 2013
Patrick Modiano /Au creux des souvenirs

Jean, un homme d’âge mûr se penche sur son « carnet noir », replongeant ainsi dans des souvenirs d’une période de sa jeunesse -les années 60, qui l’ont marqué profondément. Il évoque sa rencontre avec un groupe d’individus qu’il surnomme « la bande de Montparnasse » dont les activités plutôt louches ont impliqué la mort d’un homme. Parmi eux, une jeune femme mystérieuse, Dannie qui se cache en réalité sous de fausses identités, attire toute l’attention du narrateur. Il l’a rencontrée à la cafétéria de la cité universitaire mais elle n’est pas étudiante. Qui est-elle ? Jean est intrigué par ces êtres qui ne se dévoilent presque pas, gardant une part d’inexplicable. Il se fera par ailleurs interroger par les enquêteurs à leur sujet afin d’établir les liens qui l’ont uni à cette bande.

 Détective de sa propre histoire

Une fois encore, Patrick Modiano nous immerge davantage dans une atmosphère qu’une véritable histoire. Il décrit « un Paris » désincarné, d’après-guerre et s’attache tout particulièrement à dépeindre des lieux -le quartier du Montparnasse, Jussieu, la place Monge, avec une précision incroyable. Une façon peut-être pour le narrateur de s’imprégner des lieux afin de revivre plus intensément son histoire. Les secrets affleurent, les mystères flottent, les silences sont nombreux. C’est une ambiance empreinte de mélancolie qui berce l’ouvrage : « Quelquefois la vie est monotone et quotidienne, comme aujourd’hui où j’écris ces pages pour trouver des lignes de fuite et m’échapper par les brèches du temps ». Jean mène une « lutte » contre le temps qui passe, la mémoire qui fuit, qui oublie les évènements passés : « Le passé ? Mais non, il ne s’agit pas du passé, mais des épisodes d’une vie rêvée (…) à la morne vie courante pour lui donner un peu d’ombre et de lumière ». Il écrit pour se rappeler, pour ne pas laisser filer tous ces éléments qui l’ont touché et l’ont fait s’interroger notamment sur la quête de l’identité.

Les lecteurs de Patrick Modiano ne seront pas déçus par ce roman car il semble s’inscrire dans la continuité de ses œuvres. Pour ceux qui n’ont jamais lu d’ouvrages de cet auteur réputé, voilà une jolie introduction à son oeuvre.

 

Par Elise DAVID

 

L’herbe des nuits, de Patrick Modiano, publié chez Gallimard, 16 euros

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