La Familia Grande. A l’image du livre de Camille Kouchner, sorte de Festen à la française, la « grande » famille du cinéma métropolitain était réunie ce vendredi 23 février 2024 à l’Olympia, pour la 49 ème cérémonie des Céesar. L’occasion pour Judith Godrèche de monter sur scène pour rappeler que le silence de la profession, malgré le #metoo américain, avait été à l’origine du sien et que, comme elle, elle espèrait que l’omerta soit brisée, par d’autres qu’elle. Sera-t elle entendue? Cela lui valu une standing ovation, avant et après son discours, manière de la faire taire ou de reconnaître hypocritement et non sans gêne que les prédateurs réalisateurs avaient pu compter sur leurs équipes techniques, producteurs et autres acteurs pour se taire, apeuré d’être blacklisté et perdre leur job comme le révèle une édifiante enquête de Télérama cette semaine. A part elle, toutes se sont tues, à l’image de Diane Kruger, Juliette Binoche ou encore de Sandra Hüller, scrée juste avant minuit, César méritée de la meilleur actrice, pour Anatomie d’une chute de Justine Trillet, grand gagnant de la soirée avec cinq César dont celui, récompense suprême, de meilleur film de l’année.
Tunnels de mercis
Avant cela , il y eut Valérie Lemercier comme Présidente, bien sage et pas drôle, pour ouvrir une soirée à périr d’ennui, devant la nouvelle Ministre de la Culture, Rachida Dati dont la tenue très sobre contrastait avec le défilé de robes spectaculaires comme pour Diane Kruger, Juliette Binoche ou Marion Cotillard, vêtue d’une cape en tulle noire ridicule- la coiffure n’était pas plus heureuse, qui s’est livrée, en parlant de Christopher Nolan, « homme de génie auteur d’un chef d’oeuvre-sic à une « danse du ventre » des plus ennuyeuse et ridicule, portant au pinacle le réalisateur américain, pourtant reparti les mains vides; ceci, malgré son courage de rester trois heures durant à écouter des tunnels de remerciement qui, cette année, concernaient aussi bien les équipes que papa, maman, mes enfants en oubliant le public sans lequel un film n’est rien. Certains lurent, mal, leur petit papier plombant la soirée un peu plus. « Make it short », (Faite court!) comme le disent les Américains, on était loin du show que sont les Oscars; humour quasi absent, nul tableau pour se détendre comme les précédente années, le COVID cité une fois, les guerres actuelles enfin mentionnées et encore, par un absent, le talentueux Swann Arlaud, meilleur second rôle dans Anatomie d’une chute, il fallut attendre 23 heures pour qu’une inconnue parle du massacre en cours en Palestine. On est loin des acteurs engagés d’antan qui profitaient de la scène pour en faire une tribune. Zéro risque dans la Familia grande qui comme tous les médias français redoute d’être qualifiée de « radicalisme ». Pas plus de risques pris par Jamel Debbouze qui remit après un long one man show le César d’honneur à Agnès Jaoui, très émue et à tout jamais sans son alter ego, le regretté Jean Pierre Bacri, avec une question: Qu’aurait-il dit, dénoncé?
Peut mieux faire
La soirée fut seulement sauvée par la plus silencieuse d’entre tous, la très sobre Ariane Ascaride dont l’égo n’a pas explosé malgré sa longue carrière à la différence de Valérie Donzelli qui ne laissa aucune pace à son partenaire sur scène, y compris l’occasion de toucher la statuette dorée. Le règne animal récolta plusieurs prix techniques biens mérités tandis que l’on espère que d’ici 2026, pour les 50 ans des César, Canal Plus diffusera une cérémonie un peu plus excitante pour le téléspectateur qui a du zapper bien avant la fin, ce que notre professionnalisme nous a empêché de faire.
LM