Sur scène que des femmes. Les hommes sont ici des fantômes, objets de tous les fantasmes, de tous les désirs pour ces cinq jeunes femmes soumises à huit ans d’enfermement à la suite du deuil du père. La mort, deux fois. La mise en scène de Lilo Baur est noire, à l’image du gigantesque mur évoquant les moucharabieh des pays islamiques, si loin si proches de cette Espagne des années 30 décriée par Federico Garcia Lorca. Figure tutélaire qui n’admet aucune contestation, Bernarda Alba, impeccable Cecile Brune, est une femme coupée de ses sentiments, à la dureté pierreuse et soucieuse avant tout des apparences ; ses filles pour certaines s’en sont fait une raison, leur vie ne sera qu’un néant passé en compagnie les unes des autres. Mais le huis clos n’est jamais total. Tout comme l’étalon qui dans la cour fait trembler la maison, impatient de monter les juments, Adela, la cadette, est dévorée par ses sens naissants. Elle veut vivre, elle veut aimer et tans pis si cela se fait sur le seul homme autorisé à les approcher, Pepe le Romano, par ailleurs promis à sa demie soeur ainée, « riche en terres ». Adeline d’Hermy lui offre toute sa jeunesse fougueuse, confirmant la qualité d’une troupe où l’on retrouve, entre autre, la grâce de Coraly Zahonero et le jeu décalé de Florence Viala. Une vraie réussite.
LM
La Maison de Bernarda Alba, salle richelieu, jusqu’au 25 juillet 2015, reprise en octobre