13 février 2012
L’imminent candidat de 2012 n’ira pas sur la toile

« La campagne sera courte et violente » : cet aveu en coulisses de François Fillon vient souligner l’extraordinaire différence entre 2012 et 2007. Au moment où Nicolas Sarkozy entre en campagne avec le Figaro Magazine, le net n’est plus dans le buzz.

En 2007, Nicolas Sarkozy s’était préparé avec beaucoup d’intelligence…Et il n’avait pas hésité alors à surfer sur la toile.

Aujourd’hui, tout est différent. Renversement de tendance ! Exemple : le récent coup d’éclat des jeunes de l’UMP. Ils ont acheté comme nom de domaine le slogan de François Hollande pour mieux le détourner… Cela n’a eu aucune incidence  sur le net. Cette élection présidentielle ne passera pas par la toile! C’est dit !

On avait imaginé le contraire en s’appuyant à nouveau sur deux cas contradictoires: l’élection de Barack Obama et la campagne de 2007 de Nicolas Sarkozy sur internet.

L’exemple d’Obama

Deux exemples qui  viennent en réalité conforter l’idée d’une inadaptation d’internet à notre imaginaire politique hexagonal.  S’il est incontestable que la victoire de Barack Obama s’est faite en 2008 sur internet, c’est surtout parce qu’il faisait figure d’outsider face à la machine démocrate d’Hillary Clinton au début de la campagne. La grande particularité de la toile est de favoriser une transmission des informations par l’horizontalité et non plus par la verticalité. Ainsi, tout candidat, toute puissance qui tire sa légitimité du pouvoir lui même,  peine à trouver une place sur la toile.

L’épouse de Bill Clinton,  ex First Lady s’appuyait trop sur les réseaux de son mari, un peu comme si sa candidature portait en elle même l’assurance d’une victoire. Dans ces conditions, internet constituait un moyen pour l’outsider Obama de développer cette campagne horizontale qui a créé un buzz extraordinaire, pour une mêlée de terrain en opposition frontale aux forces de l’appareil d’Hillary Clinton.

Revenir aux grandes valeurs

Le scrutin présidentiel de 2012 ne ressemble en rien aux élections américaines. L’’imaginaire politique français reste emprunt de monarchisme et de verticalité. Dans ce contexte, une campagne sur la toile a toutes les chances de venir parasiter la construction d’une posture verticale pour le scrutin présidentiel.

En 2007, Nicolas Sarkozy avait voulu incarner une rupture et surtout, il entendait briser une certaine tradition française. Il était la rupture. Il se voulait transgressif alors même qu’il était ministre sortant. Une présence sur la toile devenait alors un moyen pour le candidat de l’époque de casser une certaine forme de légitimité et d’endosser la posture d’un candidat du  changement.

Il avait été demandé à l’influent super actif blogueur Loïc Le Meur de tisser un énorme maillage sur la toile. Dès le lendemain de la victoire du candidat de l’UMP, tout ce travail de présence net s’évanouira !

En 2012, le Président candidat Nicolas Sarkozy doit restaurer son image de Chef de l’Etat, abimée dès le début de son mandat. Et après. Il veut reconquérir le cœur des catholiques blessés par le Fouquet’s le yacht de Bolloré et l’Epad de son fiston, explique l’entourage… Il veut revenir aux grandes valeurs de la France pour dépasser les pesanteurs de la société. Le rapport direct au peuple ne passe pas par le net, mais par le référendum. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir un site élyséen hyper actif. La gauche l’accuse de jouer aux gendarmes et aux valeurs… et François Hollande entend bien lui aussi démontrer qu’il jouit d’une stature de présidentiable. Le référendum, d’accord : lors du vote du 22 avril 2012, pour l’Elysée. François versus Nicolas…L’un comme l’autre sont d’abord des candidats en opposition avec la nature même d’Internet.

Au fond, la défiance face aux élites, et à la nécessité de trouver un « chef » pour affronter les épreuves qui s’imposent au pays, favoriseront une élection à l’ancienne, au point de réveiller un certain monarchisme français. Le monarque n’est-il pas d’abord celui qui protège ? Verticalité, viralité, horizontalité, centralisé… Le net en a rendu beaucoup très mégalo. Mais Hollande et Sarkozy savent tous deux que leur destin ne se jouera pas sur Twitter.

 

Par Bertrand Delais

 

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