Marielle, c’était bien sûr une voix inimitable. Et un style: élégant, tout en noblesse, aussi remarquable à regarder qu’à lire comme dans ses délicieuses mémoires Le grand n’importe quoi qu’il avait publié en 2010. Les amateurs de musique se souviendront longtemps de son rôle de Monsieur de Sainte Colombe dans le magnifique Tous les matins du monde d’Alain Corneau. Il y sortait de son registre comique pour devenir austère et détaché du monde, inoubliable misanthrope face à Depardieu père et fils. Plus d’une centaine de films à son actifs, il baladait ses dernières années sa silhouette impeccable auprès de sa femme, l’actrice Agathe Natanson, au gré des opéras et ballets avec cette même distance amicale que son compagnon de Conservatoire, Jean Rochefort. Avec Jean-Paul Belmondo, ces trois là firent les beaux jours du cinéma français avec pour Marielle des films comme Les Galettes de Pont-Aven, Que la fête commence, ou encore Coup de torchon de Bertrand Tavernier. Pas un César ne le saluera malgré plusieurs nominations et son talent qui lui valut un Molière du meilleur comédien dans Le retour de Pinter. Jean-Pierre Marielle fut en effet un grand comédien de théâtre entre silence et regards habitués, propres à séduire le public et les femmes-il en eu quatre. Le jazz, le vélo furent ses grandes passions servies par sa verve rabelaisienne, avec néanmoins dans sa vie privée une retenue que le grand écran lui demandait de gommer. Il se régalait ainsi d’incarner des « têtes de con » et autres personnages grandiloquents. L’occasion de faire le mariolle revendiquant une certaine nonchalance. Mais restant en toutes occasion impérial, désormais à jamais.
AW