Le collectionneur tasmanien David Walsh va devoir trouver un nouveau projet. Avec la mort à 76 ans de l’un des plus célèbres artistes contemporains français, la rente viagère qu’il lui versait chaque mois contre l’enregistrement vidéo de son atelier 24 heures sur 24 prend fin. Tout comme l’oeuvre marquée par des installations où la vie côtoie la mort avec une thématique récurrente, la mémoire. Ainsi, en 1994, Boltanski rassemble dans Menschlich, plus de mille photographies en noir et blanc, résultat de vingt ans de collecte. Des enfants de la fête de Pourim s’y mèlent à ceux d’officiers nazis les portant dans leurs bras. En 2010, il est invité sous la nef du Grand Palais pour la Monumenta; son œuvre, Personnes, composée d’un immense tas de vêtements y est présentée en hiver, un choix voulu par l’artiste pour que la lumière y soit la moins forte possible, créant une forme de recueillement comme dans une église. Une référence à la Shoah dont son père, juif, échappa, et qui marqua profondément ses installations, présentées dans le monde entier. En partenariat avec l’Opéra Comique, il créé en 2020, Fosse, dans l’obscurité du sous-sol du Centre Pompidou une sorte d’oratorio pour soprano, violoncelles, pianos, percussions et guitares électriques où le visiteur déambule entre des voitures où apparaissent derrière les pare brises des visages irréels. Du noir encore et toujours au Japon, où sur l’île de Teshima, il archive dans un bâtiment noir les battements de cœur de plus de 70 000 personnes qui ont accepté, depuis 2005, de participer à son projet Les Archives du cœur. Passionné par l’humain, il n’oubliait pas non plus de rendre hommage aux animaux comme, sur la côte de Patagonie, il avait dressé des sortes d’appeaux à baleines, de grands sifflets dans lesquels le vent, en passant, reproduisait le chant des cétacés donnant vie à la légende selon laquelle les baleines sont les seuls êtres vivants ayant conscience de la destinée. Sans doute de quoi le rassurer sur la vie ici bas.
Par April Wheeler
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