Voilà dix ans que Marine Delterme portait en elle le personnage de Berthe Morisot, cette femme peintre -une des premières- qui fut dans la mouvance des impressionnistes Renoir, Monet, Degas et un certain Edouard Manet. Autant dire que le résultat est une parfaite réussite, de ces téléfilms qui vous confirment, a fortiori un samedi soir, que rester devant sa télévision est souvent le meilleur choix à faire de la soirée… La beauté des plans réalisés par Caroline Champetier qui, il faut le dire a travaillé avec les plus grands- Godard, Carax, Doillon ( César également de la meilleure photo en 2011 pour Des hommes et des dieux ) et a su, avec bonheur, se mettre au service de Marine Delterme, Malik Zidi et Alice Butaud pour offrir au téléspectateur une peinture animée, en clair-obscur et tout en finesse- du grand art. Plans séquences, économie dans les dialogues « que l’on garde le mystère », la réalisatrice a parfaitement suivi le conseil de Truffaut qu’elle cite elle-même: « tourner contre le scénario et monter contre le tournage ». Ainsi, cette période de la vie de Berthe Morisot, devenant modèle pour Manet tout en se battant pour être artiste, est-elle traitée tout en clair-obscur -sans chercher une quelconque vérité d’autant que la plupart des lettres qu’ils ont échangées ont été brûlées. Tout juste sait-on qu’il y eut une romance… Mais que contrairement à Camille Claudel avec Rodin, Berthe Morisot fut reconnue de son temps et n’y laissa pas la raison, mariée au frère de Manet et mère tardive d’une petite fille.
A peine maquillée, habillée des ravissantes robes créées par Pascaline Suty, Marine Delterme est tout simplement magnifique dans cette femme qui touche à travers son histoire le coeur même de la création artistique et la reconnaissance qui peut aller avec. A sa mort, le certificat de décès mentionnera d’ailleurs « sans profession » tandis que sur sa tombe au cimetière de Passy est inscrit: Berthe Morisot, veuve d’Eugène Manet. Voilà qui n’est pas abordé dans cette fiction qui s’attache seulement à quelques années de la vie de Berthe. Et qui telle un tableau, est à regarder presque religieusement, avec cette idée que lorsqu’une chaîne laisse la liberté aux personnes de talent comme ici, le résultat vaut largement un long métrage.
LM
Berthe Morisot de Caroline Champetier diffusé samedi 16 février à 20heures 45 sur France 3
Voilà peint par Manet le portrait de Berthe « aux violettes », lequel était pour Paul Valéry la plus belle de ses toiles