Belles Allemandes à l’affiche

Les fées se sont penchées sur leurs berceaux. Si la première, Sandra Hüller n’a pas la finesse des traits de l’ancienne mannequin Diana Krüger, son jeu est suffisamment époustouflant pour incarner l’héroïne bien malgré elle née dans l’esprit de la réalisatrice française Justine Trillet, très justement récompensée par la Palme d’or du Festival de Cannes 2023 pour son dernier long métrage, Anatomie d’une chute. Sandra est la mère d’un enfant mal voyant qui se voit accusée d’avoir poussé du balcon de leur chalet, son mari Samuel. Une dispute la veille enregistré à son insu par son mari et la voilà forcée de se défendre aux Assises. Meurtre ou suicide? Son avocat-formidable Swan Arlaud- la défendra jusqu’au bout dans cette arène plutôt féminine où seul l’avocat général-véritable hyène à la même voix que Marc Olivier Fogiel pêche dans la véracité de l’exercice. Deux heures trente durant, le public est bouche bée, générique de fin compris, face aux dialogues étincelants-surtout la retranscription de la dispute où l’on assiste à l’affrontement entre un homme « de projet », persuadé de s’être sacrifié pour son fils et la carrière de romancière de sa femme et celle-ci, implacable dans ses raisonnements et sa froideur affichée. Celle-ci n’est pourtant que de façade et c’est là tout le talent de la comédienne de savoir jouer une mère accomplie, ô combien cérébrale face à la mécanique judiciaire. Diane Krüger est pour sa part une pilote chevronnée d’avions de ligne qui contrôle sa vie comme son tableau de bord jusqu’au moment où elle retrouve son amie espagnole, ancienne amante. Marié à Matthieu Kassovitz, aussi inquiétant que réconfortant, elle va multiplier les visions, titre du film, lors de ses rêves, lesquelles vont finir par devenir réalité. Le suspens est diabolique et savamment orchestré entre sa maison contemporaine truffée de domotique, la mer comme espace de liberté ou son cockpit. La réalisation de Yann Gozlan est à la fois limpide et inspirée, avec un suspens permanent qui fait de lui un bel héritier du grand Hitchcock.

LM

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