Surfant sur la vague des spiritualités orientales, Paola di Florio et Lisa Leeman proposent avec Yogananda de retracer la vie d’un des premiers yogis à importer en Occident la pratique millénaire du yoga et de la méditation, arrivé aux Etats-Unis au début des années vingt. Décrire un mouvement de pensée au travers de l’image cinématographique constitue à coup sûr une gageure et le présent biopic échappe difficilement aux écueils de l’exercice. En faisant appel à une voix de Bollywood pour le commentaire off, censée restituer celle du personnage historique, le film renforce plus l’impression de folklore « Disney-yoga », instillée par le défilement d’images de foules sur tapis, d’archives, d’images et de détails, de fonds sonores planant et de creux témoignages panégyriques, que la quête affichée d’authenticité, vraisemblablement réduite à un programme publicitaire. La confrontation avec la ségrégation raciale, violente encore dans les états du Sud, se détache cependant, et aurait mérité d’être davantage développée, voire constituer le cœur du métrage : ne s’agit-il pas de la rencontre entre deux traditions séparées par un océan comme par l’histoire ?
Retour aux racines
Avec son deuxième long-métrage aux allures de documentaire, Volta a terra, João Pedro Plácido, a voulu revenir sur la terre de ses aïeux, à Uz, petit village aux confins septentrionaux du Portugal, baigné de verdure, de brumes, de pluie, et parfois de flocons. Dans ces régions les plus pauvres du pays, minées par l’exode rural, la caméra suit le parcours de Daniel, un jeune paysan, avec le cycle des travaux des champs et des saisons. L’image ne cherche aucun artifice pour dissimuler la rudesse de conditions que l’urbanisation a oubliées, entre crudité du porc égorgé pour en faire du jambon et les clins d’oeil amusés non dénués d’une touche de tendresse lors de la tonte des moutons. Mais la modernité ne manque pas de faire intrusion dans ces rituels traditionnels : à la fête du village, Daniel retrouve une camarade d’enfance, avec qui il garde contact grâce au téléphone mobile et qu’il essaie ensuite de retrouver à la fête foraine de la ville voisine. C’est sans doute, avec ses maladresses émouvantes, cette interrogation de l’avenir, entre émancipation et attachement viscéral à la terre, dans cette confrontation entre les sentiments et les sirènes de l’emploi, teintée d’une certaine impuissance mélancolique à l’égard d’un monde que la frénésie contemporaine laisse passablement livré à lui-même, que le film se montre le meilleur. Sans discours social et politique, il esquisse une réalité, tenaillée entre ses racines et l’appel de lendemains meilleurs peut-être illusoires.