Entre Hervé Morin et François Bayrou, une différence de taille, l’éclairage. Vous avez vu comme le premier était mal éclairé lors de sa déclaration de candidature au job qu’ils veulent tous ? D’accord, l’embouchure de la Seine en toile de fond, en plus, sans avoir la vue- fait remarquable- sur Le Havre, a plus de charme qu’un écran blanc, mais les projecteurs de la maison de la Chimie, ça rend son homme bien plus seyant à l’image ! Et des images, il y en a eu beaucoup, comme s’est amusé à le souligner en arrivant sous les flash des photographes le chef du MoDem : « Ah, si vous deviez payer les pellicules… » Légèrement prosaïque, François Bayrou, qui eut droit à « Président, Président » – ça fait toujours plaisir – scandé par les photographes, histoire d’obtenir de lui une bonne photo, a fait court – 30 minutes chrono, pendant lesquelles la moitié de la salle tritura son smart phone, certains, comme ma voisine, pour envoyer en temps réel des extraits de son discours.
Homme libre
Celui-ci nous avait été distribué, tout chaud, quelques secondes avant que Bayrou n’arrive, ce qui déclencha une pagaille certaine avec le service d’ordre hurlant « Pas sur les chaises » aux cameramans et autres photographes tentant de prendre de l’altitude pour avoir la meilleure prise; l’avait-il écrit ? « Oui, mon général » répondaient d’une seule voix tous les costards cravates présents. De quoi les différencier des journalistes, plus ou moins mal fagotés comme d’habitude avec mention spéciale pour ceux de Canal +, à fond dans la cool et jean attitude. De quoi ressembler à Marielle de Sarnez, glissée dans un jean et me lançant devant mon étonnement, « et encore, j’ai enlevé mes tennis! ». J’étais en tous cas bien content d’être là, dument badgé « François Bayrou 2012/ déclaration officielle/mercredi 7 décembre 2011/PRESSE », même si la Maison de la chimie offre dans ce petit salon du premier étage d’environ 200 m2 une décoration rappelant pour la moquette et les rideaux, les bons vieux sitcoms anglais des années 80. « Je me présente devant vous en homme libre », « Je dirai la vérité aux français », « Quand la France va mal, les français vont plus mal encore », François Bayrou lâche facilement des yeux ses notes et fait quelques digressions à son discours que certains suivent sur le papier comme si c’était un livre de messe.
Troisième sera la bonne?
Pendant ce temps-là, un photographe avec deux gros appareils de pro-un Leica M7, et un Mamyia choisissait de shooter , signe des temps, avec son Iphone tandis que des journalistes remontent l’air de rien l’allée centrale comme Cyril Eldin de « La Matinale » de Canal + , avec son air de ne pas y toucher, limite chien battu. Sa tactique ? Faire un peu pitié pour qu’on lui donne un nonos – je connais le genre par cœur… même si ce n’est pas le mien. L’oeil souriant, un petit compliment bien tourné, voilà plutôt mon style ; mais déjà, le discours est fini, Laurent Neumann s’échappe l’air pressé et la journaliste de « Dimanche + », derrière mon dos s’inquiète de savoir par où il va sortir. « Allez, on y croit », dit-elle à son cameraman tandis que Thierry Curtet, de France 2 lance au sien « Avec quoi tu veux que je monte si tu me fais pas d’images ?! ».
Bien planqués sur les cotés, les journalistes de presse écrite jubilent d’échapper à l’empoignade dans laquelle je laisse un certain nombre de poils, tandis que la question « Est-ce que la troisième sera la bonne » lancée à la cantonade au passage à Bayrou – qui finalement a choisi de sortir en fendant la cohue – reste sans réponse. Ouf, on respire ; l’équipe de « C à vous » de France 5 le cherche encore et Jean-Jacques Jégou raconte à qui veut l’écouter que « le ton était quand même très prenant » et que mes confrères avaient souligné combien son candidat avait gagné en maturité et sérénité pour cette troisième édition.
7,5 millions d’euros de budget
Trésorier de la campagne, il me raconte alors que le budget est de 7,5 millions d’euros financés par un emprunt pour payer avions, locations de salles et la trentaine de salariés. « Allez-vous faire une grève de la faim pour qu’il soit élu? », j’ose avec malice à Jean Lassalle dont on se souvient de la grève courageuse pour sauver des emplois dans sa circonscription pyrénéenne. « Pas le bon moment », me répond-t-il… en m’offrant son livre.
Mais, il est grand temps d’aller voir l’autre temps fort de la soirée : le Tweeterview, une idée de Marielle de Sarnez pour laquelle il aurait « aimé un siège plus… » et peut-être un peu plus d’intimité au vu des dizaines de photographes et caméras qui donnent à la scène une vision un peu surréaliste. « On passe à l’écran, là ». Le plan com est parfait, de quoi faire oublier la panne des écrans – j’ ai laissé traîner mes pattes dans les fils mais je jure de tous mes poils que ce n’est pas moi ! – et les micros tendus auxquels Bayrou ne résiste pas. Résultat, 0,90 tweets par minutes contre 10 pour les internautes. « J’ai toujours le même ordre, je ne peux pas avoir le dernier ? » François Bayrou découvre les bonheurs que réserve Internet « que je pratiquais avant même qu’Internet existe ! » mouhais… ; de quoi tenter une question, m’étant glissé sur le coté gauche, le droit n’ayant pas marché – est-ce un signe ? – , et savoir s’il pense que la campagne se gagnera, en ce qui concerne l’électorat jeune, sur Internet. « La campagne se gagne sur le fond, sur ce que vous êtes et pas ce que vous dites », me répond-t-il. Pas évident à traduire dans un tweet… En attendant, « Pourriez-vous vous définir ? » en 140 signes, il répond proverbe bantou-inventé : « Regarder le passé pour être assuré de l’avenir ». L’avenir, étant pour l’immédiat un premier meeting, chez lui à Pau, début d’une longue série, avec déjà arrivée, une CX noire aux vitres fumées l’attendant dehors pour le conduire dans ce marathon qui ne fait que commencer…
Par Jim
Marielle de Sarnez en tenue de combat