C’est comme cela qu’ils auraient pu se nommer, ces trois amis en quête de sagesse; Les Plombiers de la gratitude, les Eboueurs du moi, moi, moi, voilà autant de titres auxquels ils ont pensé, reclus dans une maison périgourdine pour échanger leur vision du monde avec leur casquette de moine pour Matthieu Ricard, de philosophe pour Alexandre Jollien et de psychiatre pour Christophe André. Et de citer Nietzche en ouverture: « le meilleur moyen de bien inaugurer une journée consiste à se demander, dès son réveil, si aujourd’hui l’on peut faire plaisir au moins à un homme ». Et faire fi de cet égo que les deux premiers tentent de tenir en laisse lorsque celui qui officie à Saint-Anne tente, au contraire, chez ses patients de restaurer au quotidien. Alexandre Jollien revient sur son handicap, qui l’oblige » à vivre à fond », son plaisir d’écrire-« un appel » et le bonheur d’être père, obligeant à « désapprendre, à guérir de la peur ».
Vivre meilleur plutôt que vivre mieux, voilà le leitmotiv de ces trois sages qui reviennent sur leurs propres limites et leur difficultés comme chacun d’entre nous face aux épreuves :« bénissez les obstacles, sans ces angoisses à répétition, vous seriez probablement le roi des imbéciles ». La joie inconditionnelle? Le silence de l’ego; comment y parvenir? Avec des « douches quotidienne de gratitude » comme en saisissant une feuille de papier, on peut rendre hommage aux centaines de personnes qui, du bûcheron au transporteur, ont permis qu’elle existe. Une certitude, il est heureux de se libérer des mécanismes pour retrouver « l’eau vive de la liberté intérieure », et s’efforcer à n’entendre les mots qui blessent que comme « des sons, du vent ». L’empathie, l’altruisme, la simplicité, telles sont les vertus sur lesquels les trois hommes reviennent pour qui veut tenter de » laisser grincer allègrement », et épouser l’amor fati , l’amour du destin, cher à Nietzsche. Nous lui laisserons le mot de la fin : « Il faut porter du chaos en soi pour accoucher d’une étoile dansante ». Dont acte.
LM