Se rendre à l’opéra en Europe, c’est souvent marcher sur les pas de la grande tradition. Stockholm n’y déroge pas avec son opéra construit à la toute fin du vingtième siècle par Anderberg qui, face au Château Royal lui répond avec la même pierre rose que l’on retrouve ailleurs dans la ville. A l’intérieur, dans une décoration d’histoire et d’art nouveau, c’est la même sagesse de l’âge que l’on retrouve jusque dans un public prêt à dépenser presqu’autant au buffet que pour une place à un prix relativement modeste, surtout à l’aune de Bastille et du niveau de vie scandinave. La nouvelle production de Maria Stuarda de Donizetti, confite en costumes d’époques dans la mise en scène d’Ann-Margret Pettersson, confirme semblable pondération, qui n’effraie pas l’enthousiasme du public. A décharge, on admettra que l’œuvre gagne en intérêt dans la seconde partie – le public du Théâtre des Champs Elysées pourra le vérifier à partir du 18 juin dans la mise en scène promettant d’être plus enlevée de Moshe Leiser et Patrice Caurier. Sans être d’avant-guerre, la Radio Suédoise et la Berwalhallen, au bord d’une vaste aire de verdure légèrement en périphérie du centre, affiche une modernité en phase avec la fin des années soixante-dix, et n’hésite pas faire découvrir des raretés, à l’instar du roboratif Concerto pour violon du norvégien Grieg avec l’Orchestre de Chambre de Suède. A quelques milliers de miles de là, Toronto, ville moderne offre une programmation digne de capitale internationale avec la Canadian Opera Company laquelle siège depuis 2006 au Four Seasons Centre for the Performing Arts, premier bâtiment au Canada spécialement conçu pour l’opéra et le ballet. Une fois dans le grand hall transparent de verre et de bois, le regard embrasse la coque d’une salle de 2000 sièges vêtue sobrement de tons clairs, minimaliste sans froideur, où l’on a pu comparer les deux productions du printemps : un classique de la maison, Le Château de Barbe-Bleue de Bartok par l’une des gloires de la nation, Robert Lepage, avant un Barbier de Séville réglé par le catalan Joan Font et que Bordeaux avait présenté en 2012.
Que tous les mélomaneurs néanmoins se rassurent, nul besoin de prendre les airs pour s’adonner à sa passion, avec, à Nantes et Angers, un Eugène Onéguine sobre et intemporel, réglé par Alain Garichot, tandis que l’entrée du Roi Arthus de Chausson au répertoire de Bastille constitue l’évènement de cette fin de saison parisienne, même si l’on n’est pas nécessairement assuré d’y trouver son Graal…