En 1914, il n’y a pas eu que le début de la Grande guerre. C’est en effet cette année-là, exactement un 4 avril que Marguerite Duras est née. Arte lui rend un hommage, ce dimanche soir, à la hauteur de ce qu’elle a pu représenter dans le paysage littéraire mais bien plus encore dans ce XXème siècle qui fut le sien; ainsi, c’est plus de huit heures que la chaîne culturelle par excellence vous propose de passer avec celle qui dut attendre 1984 pour recevoir le Goncourt pour son livre devenu culte, l’Amant, dont Jean-Jacques Annaud fit une adaptation des plus inspirées en 1994 et que vous pourrez revoir à 20 heures 50. Suivront Hiroshima, mon amour et deux documentaires inédits de Benoît Jacquot réalisés en 1993, où elle se raconte à travers son rapport à l’écriture, Marguerite Duras, écrire et La mort du jeune aviateur anglais, récit autour d’un de ces nombreux soldats morts pour libérer la France, en l’occurrence non loin de Trouville que Duras affectionna tant. Autant d’occasions pour entendre encore et encore la voix de Duras, à l’image de ce très beau documentaire Le siècle de Duras, en ouverture de soirée, réalisé par Pierre Assouline.
Résister, envers et contre tout
« On fait toujours un livre sur soi, c’est pas vrai leurs histoires inventées »; dès les premières minutes, Marguerite Duras est là, pour commenter avec ses mots sa vie mais également l’histoire de ce siècle qui lui fit connaître l’indigence matérielle dans ses premières années, « la honte d’être pauvre chez les blancs » vécue auprès de sa mère luttant contre les hommes et les éléments dans une Indochine raciste et sans pitié. On revoit la jeune fille, l’ovale parfait de son visage et ses yeux qui déjà annoncent la revanche, ce regard sans concession qu’ils porteront à jamais sur le monde. « Le simplisme est un fascisme », Marguerite Duras sera résistante, puis communiste, le jugeant par la suite comme il se doit- une monstruosité qui en a remplacé une autre. Elle revient longuement sur le génocide juif, « pas un jour sans que je n’y pense », tandis qu’elle commente également la vie politique française, la montée du FN et cet attachement à la gauche, se demandant comment on peut être « face à ce monde-là« , de droite. « Je n’aimerai pas vivre après l’an 2000. Ce sera le siècle de l’ennui. Une existence vaine en attente d’événements ». Duras la visionnaire, Duras l’écrivain, Duras, la femme, Duras, le médicament. Entendre cette pensée si alerte, si vive et vivante, voilà qui redonne du courage à défaut d’espoir.
LM
Le siècle de Duras, diffusé dimanche 6 avril à 17 heures 20 (à revoir bien sûr sur Arte +7), le reste à découvrir sur ce lien avec les bandes annonces