On peut être seul au milieu de la foule autant qu’en pleine mer… Ce mercredi, deux films aux antipodes sortent, l’un sans autre dialogue qu’un « Fuck », lâché après une heure de parfait silence, l’autre filmé à Bombay où même mort, on vous enterre à la verticale tant l’espace manque. Cette gigantesque métropole indienne où s’affairent chaque midi les dabbawallahs, ces porteurs de gamelles qui redistribuent sans puce ni moyen technologique des millions de repas dans les bureaux. Un système quasi infaillible que les universitaires de Harvard sont venus étudier mais qui, dans ce film révélé par la semaine de la Critique à Cannes, va se gripper. Et permettre la rencontre d’un veuf misanthrope et d’une femme au foyer, avec un romantisme qui échappe à toute gratuité. Pas question de gommer dans ce petit bijou exotique de film la difficulté de vivre ici des personnages en mal d’amour au point de penser à sauter par la fenêtre ni montrer les occasions manquées que l’on peut s’imposer. All is lost commence d’ailleurs sur cela: ce que l’on regrette quand il ne reste plus rien, que tout est perdu. Robert Redford, crinière de lion et peau ridée, va pourtant se battre jusqu’au bout, ne perdant jamais son sang froid. Nul mot n’est prononcé -pas du genre à monologuer- mais le film s’attache à montrer, tout comme The Lunchbox, cette lutte pour survivre dans un environnement hostile. On pourra trouver que le film de JC Chandor qui avait déjà traité ce thème dans Margin Call, mais en plein Wall Street et crise des subprimes, ressemble parfois à un manuel de survie de presque deux heures sans compter la fin -ratée. Le film est toutefois l’occasion d’être en tête à tête avec un des derniers géants du cinéma américain et cela ne se refuse pas…
LM