C’est dès lundi matin que l’évidence s’est imposée: la Fashion week était arrivée à Paris. Bien sûr, il y avait ces jolis petits cartons à la calligraphie toute élégante qui commençaient à arriver dans la boîte aux lettres, mais là, en faisant la queue à la boulangerie, j’avais devant moi la preuve que nous y étions bien. Blonde, environ dix-sept ans, une peau parfaite et des traits assurément slaves, elle était là, le regard un peu éteint, petit soldat n’ayant encore pas reçu son ordre de mission ni des kilos de fond de teint et autres ombres à paupières qui la transformeraient en déesse sur les podiums, narguant toutes ces pauvres femmes peinant à entrer dans leur pantalon et le teint déjà gris après cette belle rentrée automnale. Sans un mot, elle montra alors d’un doigt hésitant un beau croissant dans la vitrine, qu’elle emporta aussi vite qu’elle put dans la rue; un trophée pour les dix jours à venir et sa façon à elle de fêter son arrivée dans la capitale parisienne. Sans doute à New York était-ce un hot-dog et à Milan une gelato… Pas de quoi perdre en tout cas sa ligne aux os saillants et ce fameux thigh gap -l’écart entre les deux cuisses- qui pousse à l’anorexie bon nombre d’adolescentes rêvant de ressembler aux mannequins anorexiques qui peuplent les défilés de mode. Ceux-ci vont déferler au rythme d’une douzaine par jour jusqu’à mercredi prochain ( pour voir à quoi cela ressemble de son siège-on vous recommande nowfashion.com) avec juste le temps -et le retard- qu’il faut entre chacun afin que les limousines des rédactrices de mode puissent se frayer une place dans la circulation parisienne. Quant à chercher une place, n’y pensez pas -ces berlines sont sciemment immatriculées à l’étranger tandis que les policiers sont étrangement très permissifs… Paris, capitale de la mode, n’est-ce pas? On arrive bien à supprimer les voies sur berge pendant Paris Plage, alors pour une industrie qui rapporte 15 milliards d’euros annuel, on ferme les yeux d’autant qu’il y a de quoi s’amuser pour les forces de l’ordre à voir la foule bigarrée qui accompagne chaque défilé -du fashionista qui, en d’autres temps aurait été interné direct, aux groupies -souvent asiatiques- prêtes à flasher avec leur smartphone n’importe quel people pour le mettre dans le quart d’heure sur leur page Instagram. Un océan de vacuité et franchemant un peu toujours la même chose où la beauté toutefois émerge régulièrement avec des décors, des tissus et des femmes dont la plastique est juste étourdissante. Vous pourrez d’ailleurs en retrouver certaines sur grand écran le 8 octobre dans Mademoiselle C, clip sans fin et sans inspiration de Fabien Constant sur Carine Roitfeld, ex Madame Vogue français que l’on suit tout au long des shootings de son nouveau magazine CR. On s’y ennuie ferme -gavés de superficialité mais Dieu que les filles y sont belles! Et donnent un sens à cette usine à rêve où l’argent comme partout ailleurs est devenu roi…
AW