« Le luxe de la prison, c’est indispensable. » Régis Debray qui parlait ainsi il y a peu sur les ondes de France Culture, écrivain-médiologue, septuagénaire, l’a connu dans sa jeunesse.
Aujourd’hui, il a atteint le bel âge, titre de son dernier ouvrage, celui où un « retour de flamme » donne « une grande envie de s’ébrouer et d’en découdre, comme un chiot d’appartement sortant à l’air libre »
Alors, il fustige ces trentenaires qui ne savent que « calculer leurs points de retraite, parler assurances, sécurité, principe de précaution et taux d’épargne », « nos hommes d’influence (qui) sont de pauvres sires, et « les m’as-tu-vu des réseaux, des mafieux en col blanc » ou encore « l’Union européenne (qui) n’a pas trouvé son « il était une fois », aussi tourne-t-elle en eau de boudin. »
On l’entend à travers son écriture scander ses diatribes contre les hommes et les institutions qui oublient les sources, les bases, pour n’être plus que « modernes » ! On le voit s’ébrouer. Son œil nous perce. Il n’y a jamais de nouveau, personne n’est le premier, nous rappelle-t-il.
Des fondations médiévales, un socle Renaissance et une ouverture au monde, voilà comment Régis Debré s’impose dans notre époque. Il nous en impose par sa culture, son retour aux langues anciennes, aux grands poètes, sa foi en la Révolution restée intacte « Debout, les Anciens de la Terre ! » et son envie de fredonner « si la nuit est longue, c’est que le jour est là.»
Demain. Il croit en demain. Et on l’aime pour cela, comme il aimait son ami, Julien Gracq, cet homme avec lequel « on respirait large et sans tabou. » La chose est tout aussi vraie pour lui-même…
Par Dominique Saint-Clair
Le bel âge de Régis Debray -éditions Flammarion /Café Voltaire -108 pages – 12 euros