Il ne faut jamais oublier que les criminels ont été des enfants. Dans son magnifique livre La nuit sera calme, Romain Gary parle de ces hommes qui tournent mal. L’absence originelle de lien- pas de famille, pas de communauté, « pas de chien » et plus encore pas de respect, victimes d’une violence psychologique ou physique qu’ils reproduisent par la suite sur la nature, sur les hommes. Tony Meilhon, a eu un chat quand il était enfant. C’est lui-même qui l’a raconté à la barre du tribunal où il est jugé pour le meurtre de Laetitia, cette jeune fille retrouvée démembrée. Un chat que son beau-père aurait un jour tué, décapité puis mis dans un sac plastique jeté dans la Loire . En toute impunité, sans que sa mère ne sanctionne, la même qui dit aujourd’hui « avoir tout bien fait ». Sans doute peut-on y voir l’ acte fondateur dans sa dérive qui l’a mené dès ses quinze ans en prison et n’a ensuite été stoppée par personne. C’est elle plus que lui-même qui est à la barre des accusés; elle va vraisemblablement l’envoyer pour le reste de sa vie en prison. On ne fera rien de plus pour lui, pas plus que l’on aura protégé Laetitia de sa famille d’accueil où elle était, tout comme sa sœur, toutes deux régulièrement violées. Son père naturel réclame aujourd’hui des comptes. « C’est ma fille quand même ». Des comptes à qui? Pour quoi? Pour une jeune fille dont il ne s’est jamais occupé et pour laquelle il n’a rien su voir? Tout cela ne crée en aucun cas des circonstances atténuantes. Reste qu’en voulant plaider irresponsable, Thierry n’est pas totalement dans le faux. En niant sa responsabilité, il imite exactement la société dans laquelle il vit et où chacun passe son temps à dire: « c’est la faute de l’autre ». Avec une unique obsession: mettre quiconque a fauté derrière les barreaux.
Voilà ce qu’est notre justice au nom d’un Etat qui, par ailleurs et à bien des titres, ne l’est pas lui-même. Ainsi, cette semaine, toujours dans un registre pénal mais bien moindre et sans « mort d’homme », une élue PS a écopé de prison ferme pour clientélisme. Vous savez ce qui consiste à demander de l’argent pour privilégier quelqu’un… Le champ est vaste; de l’oubli à la commission, comme en omettant de contrôler fiscalement Liliane Bettancourt qui aurait -le conditionnel sautera-t’il un jour avec l’enquête en cours?- financé en retour en 2007 la campagne de Nicolas Sarkozy; la vente des frégates avec Balladur en 1995 n’est pas moins signifiante- là aussi l’étau judiciaire se resserre. Au plus haut niveau, l’homme se révèle coupable, celui-même qui doit incarner la probité. Pas évident alors, avec cette absence d’exemplarité, d’attendre en retour des citoyens une parfaite honnêteté.