Bouteilles de champagne sur les trottoirs, klaxons, démonstrations bruyantes, Paris était ce samedi 18 mai en proie aux réjouissances des supporters à la fois du foot et du rugby. De quoi laisser peu de place aux cultureux qui évitèrent la pluie de justesse pour cette nuit des musées qui tenta de concurrencer une soirée l’omniprésence du Festival ô combien médiatisé et également pluvieux de Cannes. Sans compter ceux qui avaient pris l’occasion de ces trois jours pour partir en week-end. Il y avait donc des conditions optimales pour qui voulait profiter des dizaines de musées ouverts jusqu’à minuit. On était donc loin des horaires de la Nuit blanche mais avec des dizaines de performances à la clé et la gratuité, il y avait de quoi se faire vraiment plaisir entre l’exposition Keith Haring et un jazz band qui illustrait un film muet de Buster Keaton dans le hall d’entrée du Musée d’art moderne de la Ville de Paris-environ 40 minutes d’attente et les petits musées où l’on entrait sans faire la queue comme la Maison Balzac. La rue a bien changé et il reste peu de terrains comme en témoigne une maquette de cette ancienne « folie » divisée en appartements dont l’un d’eux fut occupé sept années-de 1840 à 1847 par l’auteur prolifique de la Comédie humaine, qui y écrivait sans relâche, dans son cabinet de travail qu’il appelait lui même sa « prison » ou sa cellule » où il travaillait 20 heures certains jours « c’est la copie qui me mène ».
De Balzac aux Nymphéas
Les salles repeintes en violine ou en bordeaux offrent une belle collection de tableaux de la famille de cet aristocrate; reproductions de manuscrits, lettres, bustes, cannes, bibliothèque tandis que le cabinet des plaques typographiques ayant servi à l’impression des dessins de la Comédie humaine ornent un cabinet où l’on découvre l’arbre généalogique d’une précision incroyables de ses personnages. Pour la pièce de théâtre, c’est en revanche raté avec seulement 50 places disponibles. Non loin de là, la Cité du patrimoine et de l’architecture place du Trocadéro est cernée d’autocars. Nulle attente pour aller déambuler devant la réplique de l’Arc de Triomphe, la cathédrale de Laon ou du portail de la cathédrale de Rouen avec une vue imprenable sur la Tour Eiffel. Vêtus de noir et rouge, des comédiens attendent de réciter des textes pour un happening un peu difficile à imposer dans la grandeur du lieu. Non c’est bien la musique qui paraît être la plus démocratique à en juger le musée de l’Orangerie même s’il fallait accepter de ne rien voir de l’ensemble des concertistes, placés au fond du couloir central. Dommage de ne pas les avoir mis au milieu des Nymphéas…
Dialogue nocturne entre Orsay et Le Louvre
Rive gauche, Orsay brillait de toutes ses lumières face au Louvre, tous deux ouverts jusqu’à 23 heures mais pour le premier plein à craquer et donc fermé à l’accès dès 22 heures 30. Seules les collections permanentes étaient de plus accessibles alors il est était judicieux de profiter de cette soirée pour découvrir des musées moins connus comme juste en face d’Orsay, celui de la Légion d’honneur. Discret, sa façade extérieure est en rénovation depuis des années mais ne l’empêche pas d’être ouvert, rénové depuis six ans et… gratuit. Et là, il faut avouer que l’on a un choc tant il renferme de merveilles très bien mises en valeur, médailles écussons venant de tous pays tandis que le collier officiel du Président de la République est à découvrir dans une salle qui lui est consacrée. Pas du tout poussiéreux, c’est un plaisir luxueux que de déambuler au milieu de tableaux de l’empereur, et cabinet de décorations venant de tous les pays. Enfin pour finir en beauté, dans le Marais, il existe une petite merveille qui vient de subir un lifting inspiré, le musée de la chasse et de la nature, rue des Archives.
L’odeur de la savane
Autant le dire tout de suite, JimlePariser a beau être un chien, tuer un animal par jeu sans nécessité n’est pas un plaisir pour lui. Reste que le lieu est un magnifique hôtel particulier avec jardin et une cour intérieure, du mobilier d’époque et une multitude de petits cabinets, une salle des trophées où l’on sent encore les animaux embaumés, des vitrines renfermant des fusils aux incrustations de nacres et des installations d’oeuvres modernes pour un mélange de styles désormais courant mais vraiment ici sans faute avec en plus, ce samedi soir de drôles de figurants impassibles et muets. Rajoutez des canapés profonds pour se reposer dans un salon aux boiseries où l’on peut voir un renard endormi sur une chaise, un personnel adorable et vous aviez ici la meilleure occasion de la soirée pour y commencer la journée suivante, loin du tumulte des rues et de la vulgarité qui souvent l’accompagnent après une soirée trop arrosée.
Par Laetitia Monsacré
Les étranges hommes du Musée de la chasse et de la nature