C’est à la ballade de Kleinzach que je me suis souvenue que je l’avais déjà vu; ce bar, comme une barre d’immeuble, avec ceux qui font la fête d’un côté et le spectateur du côté des serveurs, cela ne s’oublie pas…Pas plus que cet air tel une ritournelle qui vous trotte dans la tête comme tous les autres de cet opéra d’Offenbach, son dernier, plein d’une belle gravité devant la vie, l’amour et les femmes. « On est grand par l’amour et plus grand par les larmes ». Ainsi se conclut l’histoire d’Hoffmann, ô combien malheureux en amour mais sauvé à la fin par sa muse, l’inspiration. Robert Carsen, lui, n’en manque pas. Signant la scénographie des deux expositions phares de la rentrée- L’Impressionnisme et la mode au Musée d’Orsay (voir article) et Bohèmes au Grand Palais, il occupe également le devant de la scène avec Capriccio à Garnier et « ses » Contes d’Hoffmann à Bastille. Il a vraiment su les rendre siens en effet, s’emparant de l’histoire comme d’un vaste théâtre où le spectateur est au milieu d’autres sur scène, tel un miroir qu’il avait déjà si bien su rendre dans Tannahauser, autre artiste soumis aux affres de l’inspiration( voir article). Les entrailles béantes de l’Opéra Bastille semblent ainsi prêtes à tous moments à le dévorer, tandis qu’il boit; avec Olympia, c’est le coit mimé sur scène avec humour et comme une évidence por suivre la voix parfaite de jane archibald qui semble beaucoup s’amuser dans ce rôle de Barbarella déjantée. « elle a fuit, la tourterelle », voilà Antonia, condamnée à mourir si elle chante et devenir comme sa mère, une momie qui semble tout droit sortie de la naphtaline avec son éventail édenté. Enfin, les fauteuils d’orchestres se mettent à danser-décors époustouflants de Michael Levine, le décorateur attitré de Carsen- sur « Belle nuit, ô nuit d’amour », avec l’apparition de la sublime Sophie Koch en Guilletta, femme aussi fatale que vénale tandis que le « faux » public se vautre dans la luxure-effets miroir encore? Hoffmann, lui perd en tous cas définitivement son reflet, l’ayant offert à cette tentatrice à laquelle le malin, Dapertutto impose avec minutie sa pose, tel un double de Carsen. Enfin, elle l’abandonne, diamants au cou et accompagnée de ce généreux donateur, en quittant la scène pour sortir tranquillement par la salle au milieu du vrai public. De quoi faire réflechir certaines dames dans l’assistance…il ne reste alors plus qu’à la muse de venir, sortie du noir abyssal et que tous deux repartent vers la lumière…Merci Monsieur Carsen.
LM
Les Contes d’Hoffmann à l‘Opéra Bastille jusqu’au 3 octobre-il reste des places