Alice aux pays des merveilles…et des poissons rouges. La boutique Bonpoint rue de Tournon, organisait ce mercredi un happening autour d’une collection « capsule » comme on les appelle, avec le fameux petit panda inspiré des mangas, œuvre de Ji-Ji, artiste contemporain d’origine chinoise. Autant le dire, le lieu est, même en l’absence d’ événement, un petit miracle de créativité-les vitrines sont à chaque fois à se pâmer-la cour intérieure, un endroit unique pour se poser à l’écart de l’agitation germanopratine (il y a un restaurant) et les vêtements et autres accessoires pour enfants dont les parents peuvent débourser 100 euros pour une robe, absolument irrésistibles, présentés au milieu de salles avec cabane en rondin de bois, kilims, et autres armoires aux merveilles. Alors lorsque vous rajoutez un chameau dans le jardin avec des lapins, des chevrettes et des perroquets, imaginez l’impression de paradis que l’endroit prit ce soir-là. Le champagne coulait à flot, le buffet tendance bio était élégant jusque dans ses fourchettes avec partout des montagnes de bonbons, pommes d’amour, façon blanche neige ou au chocolat avec le petit ourson à la guimauve, créant une ambiance très « régressive » pour la plus grande joie des enfants, mais pas seulement- qui ne savaient où donner de la tête entre ce zoo improvisé, la pêche aux canards ou le circuit automobile géant. Cinq canards attrapés=un poisson rouge- un vrai. Ils étaient là les uns à coté des autres, dans leur petit sachet plastique transparent. Comment résister? Chaque invité fut ainsi sollicité, la maison ayant prévu « très grand ». La nuit avançait, les animaux avaient été rangés, les enfants couchés et bientôt toute la jeunesse dorée se retrouva, stiletto et robe hype en pagaille, à danser aux sons d’un DJ tandis que les vigiles se battaient pour éviter que cela parte en « live »avec des jeunes peu habitués à obéir. Les poissons eux observaient tout cela, petits êtres vivants relégués à l’état de marchandise offerte et donc avec moins de valeur que n’importe quel objet du magasin et distribués comme de vulgaires petits fours. Cela fit beaucoup rire tous ces jeunes » demain , de toutes façon, il sera crevé« ( ce qui est vrai d’après internet, le sachet devant être percé et le bocal prohibé) tandis qu’un autre se risqua à philosopher sur la façon dont ils apprennent aux enfants la notion de mort. Un mois, un an de durée de vie. A surveiller chaque matin, en espérant ne pas le retrouver le ventre à l’air…Et le nourrir de ces petits flocons à la spiruline et au germe de blé que Bonpoint ne fournissait pas; pas assez chic, les boites jaunes et rouges que je dus dès le lendemain matin aller chercher. Car, deux enfants, deux poissons- forcément plus un bocal entier qu’une jeune fille éméchée me colla comme une évidence dans les mains-cinq de plus. Et de me réjouir en les regardant à travers le verre et imaginer ce qu’ils peuvent bien penser, là coincé toute leur pauvre petite vie à laquelle on n’accorda si peu de valeur, que c’est une chance que ce ne soit pas des pandas, des vrais qui furent offerts tout au long de la soirée…
Par Laetitia Monsacré
Le palais de Dame tartine…