Il n’aura donc fallu qu’une poignée d’heures pour que l’affiche de campagne du désormais candidat Nicolas Sarkozy ne soit abondamment parodiée sur le web et les réseaux. Révélée officiellement le jeudi 16 février au matin, le lendemain de sa déclaration officielle au 20h de TF1, l’affiche de « La France Forte » a donc immédiatement été moquée et détournée des dizaines de fois.
Tout au long de la journée, les parodies allaient ainsi se multiplier et se répandre sur la toile. Les jeunes socialistes allaient eux aussi réagir rapidement en mettant à disposition des internautes un « générateur d’affiches » permettant à ceux qui ne sont pas à l’aise avec Photoshop d’envoyer une image et un slogan pour proposer eux aussi leur parodie.
Bref, ça va vite, très vite.
Cela aura-t-il un impact sur la campagne ? Non, pour l’instant il s’agit d’un avertissement sans frais. Si la personnalité de Nicolas Sarkozy en fait une cible privilégiée, tous les candidats et plus généralement toutes les personnalités politiques sont ainsi régulièrement brocardées sur le web. Hervé Morin y avait goûté lorsque, embarqué dans une tirade un peu trop lyrique, il faisait part de ses souvenirs du débarquement. Nadine Morano en fait très souvent les frais.
Cela changera-t-il les campagnes à venir ? Oui, sans doute.
Les équipes de communicants de Nicolas Sarkozy et des autres candidats découvrent que le web et les réseaux sont aussi (surtout ?) une grande cour de récréé, peuplée de sales gosses trop heureux de chahuter l’ordre établi et de moquer leur très (trop ?) sérieuse communication. Il est terminé le temps des communicants tout-puissants qui pouvaient régler au millimètre le « bruit » médiatique de leur candidat en contrôlant son image sous tous ses aspects. S’il est possible de comprendre le fonctionnement des médias traditionnels et donc de développer des stratégies pour les maîtriser au maximum, c’est quasiment impossible avec le web et les réseaux. Il ne s’agit plus de connaître les habitudes et la façon de travailler de quelques dizaines ou centaines de journalistes. Il ne suffit plus de s’attendre aux parodies de Nicolas Canteloup, Laurent Gerra ou Sophie Arram à J+1.
Face à eux, ces équipes de communication ont maintenant des millions de personnes, du sale gosse rigolard au militant impliqué, prêt à venir mettre leur grain de sable dans leurs plans de communication bien huilés en quelques heures, quelques minutes.
Si pour le moment une grande partie de cette nouvelle force de frappe est utilisée « pour le LOL » et la parodie, leur hyper-réactivité pourrait s’avérer dévastatrice dans les prochaines campagnes électorales. Désormais placés sous la surveillance de ces millions d’internautes, les politiques devront en tenir compte à l’avenir. Une promesse reniée, un discours en contradiction avec une autre déclaration, un défaussement pourront immédiatement être repérés grâce à cette mémoire sans fin que constitue le web, puis diffusés aussi rapidement que largement via les réseaux.
Pour détourner un autre slogan, celui des anonymous : « Nous sommes légions, nous sommes les sales gosses du web« . Ils ont pris une partie du pouvoir sur le tempo du web et c’est assez réjouissant.